Laurent Voulzy, à l’Église Saint Pierre de Chaillot, Paris le 21 mars 2019.

A certaines occasions on va assister à des concerts où le principal élément se trouve dans l’aspect technique où une importance particulière est donnée dans l’acoustique et à d’autres moments on se rend à un spectacle qui permet de vivre une magnifique expérience charismatique. Laurent Voulzy demeure un des rares artistes à pouvoir nous faire vivre ces deux types d’événements. Assister à un spectacle du maître, c’est aller à la rencontre d’un artiste unique. Le tour de chant de Laurent instaure systématiquement un climat intimiste et chaleureux qui ne laisse personne indifférent. Une expérience intense à vivre. Une première communion pour certains. Une confirmation pour les autres.

Pour me faire entrer dans une église, un lieu de foi, il n’existe pas une multitude de possibilités : Un concert dans ce type d’édifice religieux ou un mariage. Si pour ma charmante compagne s’occupe de tous les détails pour nous mettre sur les bons rails, c’est Laurent Voulzy qui ouvre la voie pour mon retour dans une superbe maison religieuse parisienne… Un retour à des fondamentaux ecclésiastiques grâce à de longues et belles années de scoutisme qui m’ont forgé, mais un virage à 360 degrés pour l’athée que je suis devenu…


Laurent aime les gens beaux de l’intérieur et apprécie à sa juste valeur la beauté humaine qui l’entoure. Cela tombe bien, nous aussi. Chez Laurent, il y a toujours eu beaucoup de spiritualité. Il suffit de suivre sa carrière pour s’en rendre compte. Son évocation à peine sous entendue avec l’album Cache derrière, son amour du Moyen Âge et de la mysticité sur Lys & Love qu’il a enregistré dans le donjon du château de Vincennes, et maintenant sa nouvelle épopée avec une tournée dans les églises. L’homme n’a jamais fait de calculs, il reste authentique. Après la fantastique aventure d’environ deux ans avec Alain Souchon, son alter égo depuis 1974, à laquelle j’ai eu le bonheur d’assister au Zénith de Paris, Laurent nous revient pour se faire plaisir… Et bien évidemment nous le faire partager. L’artiste nous convie désormais à une nouvelle expérience spectaculaire. Une de plus !

Passionné par la période médiévale et les Cathédrales depuis l’âge de 5 ans. Pour assouvir sa passion, il a commencé à acheter dès l’âge de 18/20 ans une kyrielle de livres sur ces lieux sacrés. C’est lors de la tournée Lys & Love, en 2012 que le chanteur s’est invité pour la première fois dans ces lieux de foi et il a compris qu’il y reviendrai, dès que l’occasion se présenterai. À l’époque, le baladin, qui partageait sa vie entre la France et l’Angleterre, avait débuté son tour de chant à la Basilique Saint-Denis lors du Festival de Saint-Denis, et il l’a fini à Londres, à Saint Johns Smith Square Church, une splendide bâtisse baroque anglaise près de Westminster.

Alors que dernièrement Laurent se trouvait en période d’écriture de son disque, c’est un producteur indépendant qui eu la merveilleuse idée de lui proposer une tournée des édifices religieux. Elle a démarré le 27 septembre 2018 dans la Cathédrale de Sens. Un pur bonheur pour ceux qui y étaient. Laurent nous confie que revenir dans de tels lieux symboliques n’est pas un hasard et qu’il n’en espérait pas avoir tant de bonheur, comme il l’explique « Même si en regardant les infos, il n’y a pas grand chose pour rester optimiste, je conserve ma foi dans l’espérance et la bonne volonté des Hommes pour trouver leur bonheur dans la paix et dans l’Amour et heureusement, moins d’humains ne veulent la guerre et la destruction. » Et le saltimbanque ajoute, « J’ai encore des tas de rêves et d’envies que je désire réaliser mais en même temps, j’ai été extrêmement gâté par la vie et je remercie tous les jours le ciel et la Providence de ce qu’ils m’ont déjà donné dans cette vie… »

Et il ne s’arrête pas là. Laurent révèle à la RTBF, « J’aime aller dans les églises et les cathédrales, surtout quand il y a peu de monde, ou même personne, dans ce silence habité, où les bruits de l’extérieur qu’on entend parfois semblent irréels. On franchit le porche, et on est hors du temps, entre ciel et terre. Plantée là, au milieu des villes et des villages parfois depuis des siècles, l’église est un vaisseau spatial. Y jouer, et y chanter est un bonheur, et le lieu n’est pas neutre, car ses murs, voûtes, vitraux, piliers nous imposent leur résonance, et sont des partenaires avec qui il faut compter. Au moment où je travaille sur une pièce musicale et chantée autour de Jeanne d’Arc, le calendrier fait bien les choses. »

Cet amoureux de la vie, des chants anciens, et de l’histoire ne cesse de toujours se poser des questions. Il repousse les limites de ses rêves juste avec deux musiciens, un homme et une femme. Honneur à la femme. La harpiste, Naomi Green, une franco américaine vivant à moitié à Paris et à Los Angeles, chante une de ses propres chansons sur cette tournée. Quel délice. Elle joue également de la guitare, et en prime, elle déchire. Le chanteur s’accompagne de son ami de longue date Michel Amsellem, un excellent organiste aux sons magiques. Ce dernier était déjà présent sur la précédente tournée dans ces lieux aussi féeriques que sont ces édifices religieux. Laurent n’hésite pas à confier « Soyons francs, un seul organiste dans une église suffit à remplir le son ! »

Pour les détails de la soirée… Si tous les titres du répertoire de Laurent ne peuvent se chanter dans de tels lieux sacrés, le chanteur explique que seuls ceux qui expriment des interrogations plutôt métaphysiques, d’espoir ou des émotions profondes comme « Cache derrière », « Jeanne », « Jésus »… se trouvant en harmonie dans ces édifices sacrés,… Pouvaient apparaître dans la Setlist de cette tournée. Certaines chansons peuvent être sublimées par ces lieux aussi intimistes que magiques. Aucune chance donc de trouver « Rockollection » qui se prête davantage aux grands Zénith. Peu importe, le choix des titres se révèle une tuerie.


Normal que « Jeanne », l’un de mes morceaux fétiches, prenne une ampleur considérable sur cette tournée. Laurent précise sa pensée, « « Jeanne » me fait un effet très particulier surtout dans les églises. Chaque soir, pendant deux à trois semaines, je rentrais chez moi après l’enregistrement de Lys & Love. J’avais envie d’écrire les paroles en anglais, même si je ne voyais pas quoi y mettre comme sens. Je savais juste que je désirais écrire le texte de cette chanson. Finalement, c’est Alain Souchon qui l’a rédigée. Comme chaque soir, j’écoutais cette chanson, avec ou sans casque, sur mon Macintosh devant moi, juste l’enregistrement de la musique et mon texte en yaourt anglais. Je cherchais vraiment ce que j’allais pouvoir raconter, mais rien ne venait. Puis une nuit, je me suis endormi à environ deux heures du matin et une voix m’a réveillé… Ce fut incroyable. Cette voix m’a soufflé le prénom Jeanne. C’est un prénom tellement banal. Dans le contexte, je ne sais pas pourquoi j’ai entendu une voix, mais je me suis dit « Ce sera le premier mot de la chanson ! » Cette chanson est entourée d’une part de mystère pour moi. Elle m’a toujours fait une drôle d’impression. Elle m’émeut comme si elle n’était pas de moi. »

La grâce peut toucher à tout moment. Avec Laurent, cela devient même une habitude. Cette nouvelle tournée a nécessité un travail titanesque et colossal quant à la réorchestration de chaque chanson. Une nouvelle dimension forte et puissante dans l’interprétation de chacun des titres que le public découvre avec une acoustique exceptionnelle. Le résultat se prend comme une véritable offrande charismatique de la part de l’artiste et comme une énorme claque bienfaitrice. Quand on connaît l’exigence du Maestro pour la réalisation, l’enregistrement et tous les détails dans son métier, on ne peut s’imaginer que dans de tels lieux les voix soient laissées au hasard. Laurent adore profondément les chœurs de Naomi et Michel. C’est le moment de vérité !

Les deux musiciens préparent le tapis musical pour l’arrivée de l’artiste. Laurent débarque sur cette estrade au bout de 3 minutes d’une musique planante….« Caché derrière » ouvre ce spectacle hors du commun. À peine commencé et la chair de poule se ressent déjà sur mon corps. Et ce n’est que le début d’une succession de moments tout aussi étranges qu’admirables qui suivront. Lorsque la phrase « Le cœur en pèche » est interprétée sur « Le rêve du pécheur », Laurent regarde vers le ciel. Ce geste pourtant si anodin dans une église prend alors une dimension bien particulière. Il nous propulse dans une autre dimension. Ce concert ne sera définitivement pas un spectacle comme les autres.

Pour la troisième chanson, « Belem », Laurent explique qu’elle possède plusieurs significations : l’autre nom de Bethléem, la superbe cité de Cisjordanie, celui du quartier d’une remarquable tour de Lisbonne, celui d’un voilier sur lequel il est monté, et qu’il a pu visiter le seul jour où le bateau était resté à quai. Cette chanson fait référence à toutes les significations de Belem. Quelle ironie pour cet amoureux de la mer… Peu importe, de cette visite insatisfaisante, il en composera une chanson admirable qu’il nous offre sur son dernier opus en date.

Ce tour de chant s’avère parfait et il y règne une ambiance envoûtante. L’audience se révèle complètement captivée par un jeu de scène sobre, parfaitement à l’image de Laurent, et des lumières exceptionnellement magnifiques. Ce spectacle donne des frissons, même si le son pêche quelque peu, mais est-ce vraiment important ? L’essentiel réside ailleurs. La magie du lieu et l’aura de l’artiste se mariant parfaitement nous permettent d’assister à une soirée totalement insolite… Quel bonheur !

Pour la chanson suivante, « La baie des fourmis », Laurent nous raconte la genèse de ce titre. Et comment il a fallu au célèbre duo, Laurent et Alain, trois jours dans un lieu exceptionnel au bord de la Méditerranée pour parvenir à pondre cette chanson. Alors que Alain trouve le monde désespérant, ce que Laurent veut bien admettre, ce dernier demeure bien plus optimiste au quotidien. C’est au travers de ce méticuleux mélange que le duo a trouvé la combinaison parfaite. Si après une ballade et quelques méditations bien senties, c’est Laurent qui eut l’illumination en trouvant ce titre, mais Alain ne semblait pas très emballé. Comme ce dernier n’avait pas mieux, le titre a été accepté à l’unanimité.

Laurent aime l’histoire moyenâgeuse, les merveilleuses chansons et les artistes majeurs des Seventies. Il n’en fallut pas davantage pour qu’il rende hommage à ses deux passions. Après avoir remis la chanson « Scarborough Fair », de Simon And Gartfunkel, dans le contexte initial, Laurent l’interprète en duo avec Noémie Green dans une grande subtilité et une interprétation remarquable. L’atmosphère des lieux, la générosité de Laurent et la douceur de ce titre nous transportent dans les temps immémoriaux du Moyen Âge. Quel voyage délicieux… !


Du Moyen Âge à l’église, il n’y a qu’un pas. Le Père Joseph Wresinski, fondateur de ADT (Quart Monde International), un mouvement qui lutte contre la misère et qu’il a combattu pendant plus de 50 ans, lui commanda un soir de Noël une chanson sur le thème qui lui tenait à cœur. Suite à cette rencontre, le chanteur nous raconte la genèse de la chanson « Jésus », quelques années après le décès, en 1988, du Père Joseph Wresinski, « Je ne désirais pas devenir le porte-parole de la misère. Tout le monde est contre la misère. Ce n’est que quelques années plus tard, lorsque j’ai croisé sur un plateau télé l’Abbé Pierre que je lui ai confié que le Père Joseph Wresinski, qui était son ami, m’avait demandé de lui écrire une chanson. L’Abbé Pierre médita quelques secondes puis me lança : faites là. C’est ainsi que je me suis mis au travail et que je l’ai intégré le titre simplement appelé « Jésus » sur le disque « Avril ». Dès les premières notes de ce morceau, il se passe indéniablement quelque chose de différent. À l’aide d’un jeu de lumière exceptionnel, le moment devient magique. Une lumière blanche immaculée se projette sur le « Christ » au fond de l’église. Laurent visiblement très ému interprète cet hymne si émouvant dans un silence de Cathédrale. Quel délicieux instant christique que nous vivons. La paix et l’Amour règnent dans cette église. Le silence dans les travées honore la mémoire du Père Wresinski. Ce moment intense nous dépasse. Il suffit de le constater à la chaleur des applaudissements à la fin de la chanson qui semblent s’éterniser.

Suit « Le carillon de Vendôme », une chanson ancestrale que nous interprète Naomi Greene. Un autre moyen de poursuivre notre chemin de foi. Dans cette église, l’émotion prend sans conteste une ampleur exponentielle. Jamais un concert de Laurent ne fut porté par une telle atmosphère. On se croirait en pleine messe. Ce n’est pas sans me rappeler les moments exceptionnels et inoubliables à New York City lorsque j’ai assisté à un office en Gospel dans le Bronx… Ce moment unique se répète ce soir dans cette église parisienne. Quel plaisir. Un rêve éveillé défile devant mes yeux et dans mes oreilles…

Vient ensuite un nouveau standard international. « Feelin’ Groovy », autre composition de Simon And Gartfunkel. Elle arrive délicatement sur la voix cristalline de Naomi Greene. La guitare raffinée de Laurent s’installe dans une ambiance chaleureuse. Et nous voilà partis pour un nouvel hommage au fantastique duo américain Simon And Gartfunkel. Laurent propose un moment magistral avec sa Setlist.

Toujours aussi discret et généreux, le galant Laurent ouvre la scène à sa musicienne afin qu’elle nous fasse découvrir son œuvre. Sa présentation possède ce petit quelque chose que ceux qui connaissent bien Laurent ne va pas étonner, une seule seconde… À propos de Naomi Greene, le chanteur lâchera « Naomi va vous chanter une de ses chansons. Elle écrit et chante de superbes chansons. Elle va le faire dans ses deux langues, anglaise et française. Elle a deux langues, elle a bien de la chance… » Un moment si délicieux dans un tel lieu… Laurent, lui même amusé par ce lapsus, fera rire toute l’assemblée, mais il en sera bien vite pardonné. Peu importe, Laurent laisse la scène à Naomi et sort sur la pointe des pieds.

Après l’exquise prestation de Naomi Greene, Laurent revient sur scène sans sa veste pour un des plus beaux moments de la soirée, enfin, selon moi. Il décide d’interpréter la somptueuse chanson « Ma seule amour ». Un éminent titre du répertoire de Laurent sur un très brillant texte datant du 14ème siècle. Et je dois bien avouer, un parolier très particulier : le Duc Charles d’Orléans, longtemps emprisonné en Angleterre. Une des rares infidélités à Alain Souchon. Mais, Alain lui a bien vite pardonné. Les chœurs d’une sublime chorale mixte, conduits par Sammy, arrivent et rendent ce moment complètement désarmant. J’en suis bouleversé. Quelle version splendide de ce duo « Ma seule Amour » initialement interprété avec Roger Daltrey, chanteur émérite des Who, avantageusement remplacé par la non moins sublime Naomi Greene. La chorale s’installe pour trois titres. Le frisson me gagne. Cet instant se prolonge et nous emporte vers des cieux symboliquement incarnés. « Liebe », accompagné des chœurs délicieux, se révèle juste incroyablement bon. Les chants caressent mes oreilles et mon cœur de la plus belle des manières. Laurent connu pour être très joueur, ce soir, il va pousser cet instant déjà sublime vers un moment d’anthologie pour tous les spectateurs… : sous les doigts magiques de Samuel Liegon, le vieil orgue de l’église apparaît comme par enchantement dans la musique de Laurent, la chorale propose une dimension incroyable dans cet admirable titre, et le remarquable solo final de Michel Ansellem vient clore cet instant sacré. Exceptionnel ! Exquis… Que dire après avoir vécu un tel moment ? Vraiment.


Laurent fait répéter les choristes dans le public pour cette fois les mettre à contribution : un chœur en canon sur « Vent frais, vent du matin », ce chant scout composé en 1965 que j’ai si souvent chanté durant mon adolescence . Cet air enfantin reprend la mélodie du canon « Hey, Ho Nobody At Home ». Les voix se superposent. Laurent dirige ensuite son auditoire sur un « Hallelujah », superbe titre de George Harrison. Encore un hommage… N’oublions pas que Laurent demeure un fan inconditionnel des Fab Four. Pendant la chanson, la communion se trouve parfaite. Laurent circule dans la coursive gauche afin de porter son public à entonner de tout cœur ce superbe hymne anglais. Sur ce morceau, Laurent s’adjoint les services de deux guitaristes en plus de Naomi Greene. Laurent aime laisser de la place aux autres musiciens pour s’exprimer. C’est donc Vincent Caudron, son ingénieur du son, qui se colle exceptionnellement au superbe solo de guitare pendant que son « Guitar Tech » accompagne le groupe d’une rythmique solide et efficace. Avec Laurent, il faut toujours se positionner au service de la musique.

Si la chorale quitte la scène, Laurent offre un nouveau moment d’exception avec une version magistrale de « Jeanne ». Rien à en dire, juste à écouter et à déguster. Que dire lorsque les premières notes de « Le pouvoir des fleurs » résonnent dans ce lieu sacré. Autre titre interprété en duo avec la sublime Naomi. Quelle magie ! Le public s’emballe dès le second couplet. Il tape la mesure et chante avec le cœur. Enfin, pas trop longtemps quand même. Heureusement. Vu l’acoustique assez médiocre, cela devient très vite inaudible. N’oublions pas qu’une église n’est pas faite pour accueillir ce type d’événements… Ceci n’empêche pas un final ahurissant pour cet hymne à la paix et à l’amour. Laurent fait monter la tension à son paroxysme afin de changer les âmes et les cœurs de ses proches aussi bien avec des bouquets de fleurs qu’avec des prestations artistiques aussi formidables… Le public exulte en s’abandonnant comme s’il était gentiment envoûté par un Laurent qui se lâche avec passion sur le devant de la scène et un Michel qui distille une nappe musicale New Age pour une atmosphère si merveilleuse. La Standing Ovation plus que nourrie, près de deux minutes durant, après cet hymne « Voulzien » en témoigne. Incontestablement…


Laurent en profite pour se préparer à un rappel d’anthologie. La salle s’avère complètement conquise. Mais, comment en aurait-il pu en être autrement ? Le rappel de plus de vingt minutes va davantage déchaîner la foule. Tous se lèvent. Les fans se précipitent vers le devant de la scène. Laurent nous embarque vers un somptueux « Belle île-en-mer, Marie-Galante ». La joie de mes voisins se lit sur leurs visages. L’éclat de cette chanson et la magnificence des lieux nous transportent dans cette traversée du temps. Le public en redemande. Il ne désire pas laisser partir l’hôte de cette soirée. Personne ne le désire. Laurent nous plonge dans un nouveau voyage dans son répertoire en enchaînant un Medley exceptionnel, « Désir, désir » superbe duo qu’il a interprété avec son ex-compagne, Véronique Jannot, puis « Cœur grenadine », « La fille d’Avril », et un délicieux « Le soleil donne » pour finir ce pot-pourri. En une dizaine de minutes, et après avoir demandé à son ingénieur du son qu’il arrête l’écho qui l’empêche de jouer dans ce somptueux décor qu’est cette église, le public s’envole vers d’autres cieux grâce à son soleil qu’il offre à chacun de nous. J’en ressens les bienfaits. Le temps nous porte vers la fin d’une excursion musicale unique qui s’achève sur un titre de circonstance, « La nuit ». Quelle douceur et quelle beauté de partager une telle soirée… Le cœur s’envole. La paix s’infiltre en nous. La sérénité nous entoure. Je ne compte pas les fois où je suis allé voir le magistral Laurent Voulzy en concert, mais incontestablement, ce spectacle restera pour moi son Masterpiece, son plus grand chef d’œuvre scénique. Que pourrait-il faire de mieux… ? Et le pire, c’est que le bougre trouvera encore à nous étonner. J’en suis certain…

Alors, en attendant, pour finir en beauté, une soirée qu’il ne fallait rater sous aucun prétexte, Laurent nous dit au revoir à sa manière, « Le temps est venu de se quitter. Mais bon, nous allons tous partir dans des endroits différents. S’éloigner les uns des autres. Mais, plus on s’éloigne et plus on s’aime. C’est le paradoxal système. » Avec le joli texte de « Paradoxal système », cette chanson de 1992 rédigé par Alain Souchon, Laurent s’exprime sur une délicieuse musique de Michel Ansellem. Ce morceau devient un dernier cadeau remarquable. Le temps d’écouter « Paradoxal système », le dernier titre de son tour de chant si exquis, je me remémore tendrement ces quelques phrases « Plus je m’éloigne et plus je t’aime, c’est le « Paradoxal Système ». Que dire de son final, « Parce que je pars, il y a de l’eau dans ton regard. Mais les pleurs que tu pleures sont inutiles car tous les départs resserrent les cœurs qui se séparent. Bien que loin, je suis contre toi »… Avec Laurent Voulzy, cet homme avec autant de générosité et un cœur gros comme un « Cœur grenadine »… , comment ne pas vouloir revenir assister à un autre de ses concerts ?

La soirée déjà exceptionnelle marquée par sa sobriété évidente et son caractère incarné offre un moment inoubliable pour tous ceux qui ont eu le bonheur d’assister à la communion d’amour et de musique que nous propose depuis plusieurs décennies Laurent. Ces débuts pas si prometteurs en 1967 ne pouvaient laisser imaginer une telle carrière prestigieuse pour ce fils d’homme d’affaires et politique guadeloupéen. Laurent Voulzy, un cousin éloigné de Pascal Légétimus, peut être fier de son parcours… Le public ce soir dans l’église ne s’y trompe pas. Il lui envoie des mercis largement mérités avec trois minutes d’applaudissements provenant de cœurs bien remplis par tant d’amour et de félicité d’une audience ayant compris que cette messe musicale, ils ne sont pas prêts de l’oublier. La joie se lit sur tous les visages. Se ressent dans l’air. Se vit dans un sublime partage. Laurent quitte cette illustre église avec « Amis de Paris, des villes et des villages j’ouvre votre porte… »

Au final, ce sera 1 heure et 52 minutes d’un périple extraordinaire porté par la magnifique musique du sublime Laurent et les textes merveilleux de son frère d’armes Alain Souchon. En assistant à un tel événement, il demeure une évidence : si Laurent n’a pas écrit le texte de la merveilleuse chanson de Calogero, « Les feux d’artifices », il en a bien compris le sens… « Nous sommes comme des feux d’artifice. Vu qu’on est là pour pas longtemps. Faisons en sorte, tant qu’on existe. De briller dans les yeux des gens. De leur offrir de la lumière. Comme un météore en passant. Car, même si tout est éphémère. On s’en souvient pendant longtemps ».

Merci Laurent de nous avoir attirés dans une telle bâtisse afin de nous offrir de l’amour, de la beauté et du bonheur.
Texte & images : Carlos Sancho