« L’important est de participer », comme le soulignait Pierre de Coubertin. Croyez-le ou non, mais nos Roses de cœur, elles ont bien pris ce slogan au pied de la lettre. Arrivées 26ème au classement général, Clémentine et Christine ont réussi leur pari : terminer leur Rallye quoiqu’il leur arrive. Le cœur plein d’émotions, leurs yeux remplis de splendides images, les oreilles assourdies par ce bruit de leur engin de la mort, elles ont conquis le cœur des Argentins et sont parvenues à se dépasser tout en apportant de la joie à une horde de locaux tout au long de leur chemin dans la cordillère des Andes. Après l’effort, le réconfort parait-il… C’est l’heure aux festivités pour nos deux soldats de l’humanitaire. Merci pour votre voyage et nous vous souhaitons un excellent retour dans votre réalité. Allez Christine, un dernier petit texte pour nous. Encore quelques mots, quelques images, quelques soupirs … Nous en voulons encore pour savourer ces derniers instants auprès des Roses et d’une aventure qui restera sans nul doute un voyage initiatique des plus exquis. Merci pour ce voyage.

Le 30 avril : Un final en apothéose…
Enfin... Pour notre ultime matinée, une grâce mat’ s’impose ! Réveil à 7h. Certaines traînent au lit pendant que d’autres s’activent pour ne rien rater. Pour ma part, comme chaque jour où j’ai eu une connexion Internet, j’en ai profité afin d’envoyer plein de textos par WhatsApp à mon chéri… Je jouis de ces moments trop rares de communication avec mon bien-aimé qui me manque de plus en plus. Le temps avec lui passe vite, trop vite. Je compte les heures avant nos retrouvailles, les vraies. Après une douche délicieuse, mes échanges amoureux, je fonce m’habiller, avant de descendre pour me ravitailler avec un petit déjeuner copieux, tout en continuant à correspondre avec mon chéri. Le repas est composé de fruits frais et secs, de plusieurs variétés de pains frais, de viennoiseries et autres gourmandises, parmi lesquelles la confiture de lait, -une spécialité du coin à ce que j’en déduis-. Ce repas me change du pain de mie industriel englouti brut ces derniers jours. Et Dieu sait que maintenant je n’aime vraiment pas le pain de mie… Désormais, je peux même dire que j’en suis écœurée. Après ces délicieux mets avalés, nous nous retrouvons entre Roses dans le Lobby pour notre prochaine étape humanitaire.

Nous voilà désormais embarquées dans un bus qui nous conduit au centre équitheraphie Del Azul de Salta, un centre médicalisé pour enfants handicapés. J’ignore à quoi nous nous attendons, mais une chose demeure certaine : nous allons encore vivre de belles émotions. Je ne suis pas au bout de mes surprises. Nous y rencontrons l’équipe de l’association française « Les enfants du Désert » présidée par Laetitia Chevallier, Helena -La directrice du centre-, et son équipe de professionnels. Nous écoutons attentivement leur présentation dans la langue de Molière. Chacun des intervenants explique son rôle et son travail auprès des enfants qui ont la chance de bénéficier de soins ici. Selon moi, ils s’avèrent trop peu nombreux lorsque l’on connaît la réalité ici. Rappelons que 13% des enfants qui naissent dans cette région souffrent d’un handicap et les structures demeurent insuffisantes afin de les stimuler et les amener à une certaine autonomie. C’est une lourde tâche quotidienne pour ces professionnels qui mettent leurs savoir et expériences, leur temps et leur énergie pour aider ces enfants handicapés. Mais, comme la vie se trouve toujours assez mal faite dans ces moments-là, l’équipe dirigeante de l’association doit faire face aussi à des complications administratives, en plus des préoccupations sanitaires auxquelles ils s’adonnent au quotidien. Grâce à un travail acharné, ces deux années de bataille administrative, ils ont enfin été récompensés de leurs efforts : le centre a obtenu un agrément officiel permettant aux familles d’avoir une prise en charge partielle des frais par le système social argentin. Respect à ces combattants pour la vie et aux luttes contre le handicap. Nous en oublions que notre maigre participation les aide beaucoup. Les organisateurs nous expliquent alors en quoi notre contribution leur a permis de décrocher ces avancées. Après cet aspect théorique avec un discours didactique très intéressant, nous comprenons un peu mieux les enjeux de cette association et l’importance de poursuivre notre action humanitaire.

La matinée va nous emmener encore plus loin dans la compréhension des enjeux auxquels l’association doit faire face au quotidien. Nous voilà parties pour une plongée dans la réalité en allant à la rencontre des infrastructures et surtout des enfants qui nous attendent et que nous sommes pressées d’aller embrasser. Nous visitons pour débuter les salles de classe, les ateliers et les équipements pédagogiques qui ont été construits par le financement de chacune des participantes aux Roses des Andes. Là, nous prenons réellement conscience du volet solidaire et humanitaire de notre Rallye, ce pour quoi nous nous sommes mobilisées depuis des mois. Je me sens encore plus fière d’apporter ma contribution à ces enfants handicapés.

Mais le plus déstabilisant reste à venir. La claque vient lorsque l’on se trouve face à ce que les enfants handicapés font pour nous remercier. Ils travaillent depuis plusieurs semaines avec leurs éducateurs afin de préparer notre accueil. Nous étions loin d’imaginer ce qui allait nous exploser aux visages des Roses que nous sommes. Les professionnels de l’association ont enregistré plusieurs vidéos qui témoignent de la forte implication des bambins à réaliser des gestes anodins pour nous, mais si compliqués pour eux… Les vidéos sont poignantes. Les petits nous montrent comment ils se démènent et nous démontrent à quel point il leur est difficile de réfléchir par eux-mêmes, de composer une simple liste d’ingrédients, de confectionner une pizza s’ils veulent juste répondre à leur faim, préparer des biscuits pour satisfaire le goûter de gamins innocents, ou tout simplement composer le Lunch qui nous est offert aujourd’hui, et réaliser des banderoles de bienvenue afin de montrer leur immense joie de nous recevoir dans leur univers qui les protège de toute autre complication de l’existence… Bref, à apprendre et répéter des gestes qu’ils reproduiront devant nous… Ces handicapés nous donnent une leçon de vie exemplaire.

À notre tour d’être admiratives de ces enfants qui passent chaque jour autant d’épreuves… La suite nous permettra de constater encore davantage leur dure réalité. Nous faisons la connaissance de deux magnifiques chiens, le Golden Reithriwers, dressés afin d’aider les bambins à accomplir certains de leurs gestes les plus élémentaires, comme ôter un blouson. Cela n’a l’air de rien de se dévêtir pour nous, mais pour eux, cela devient un véritable parcours du combattant. La technique très particulière est stupéfiante : le dogue saisit dans sa gueule l’extrémité de la manche du vêtement et la tire délicatement pour aider l’enfant à libérer son bras. Notre émotion face à une telle réalité nous dépasse. Mais, cela ne s’arrête pas là. Nous allons aller vivre d’autres instants encore plus émouvants. Nous parcourons quelques pas, vers un pré, et nous voilà reçues comme des princesses par un orchestre qui joue solennellement l’hymne national argentin, ainsi que La Marseillaise, afin de célébrer l’amitié franco-argentine. Ce moment semble décalé, mais il nous touche en voyant ces musiciens prendre cette solennité avec un réel plaisir de nous offrir ce qu’ils pensent être une marque de respect envers nous. Une fois ces mondanités expurgées, vient le moment où, enfants, éducateurs, psychothérapeutes, et chevaux s’avancent sur une scène champêtre pour une démonstration de séance d’équitherapie… Le spectacle se révèle somptueux. Là, encore les émotions montent crescendo…


La cérémonie commence par une stimulation musicale, des chants avec des cris tribaux, des claquements de mains rythment la musique argentine d’un éducateur chanteur et guitariste, des pas de danse locaux collent au tempo… Ensuite arrive le moment que les enfants attendent avec impatience. À ne pas s’y tromper, leur joie autant que leur impatience se décèlent dans leurs regards pétillants. Chaque enfant avec ses capacités, aussi petites soient-elles, prépare sa monture. Le spectacle que nous offrent ces petits est d’une beauté à contempler. Les chevaux s’avèrent d’une docilité impressionnante… C’est là encore que l’on voit qu’un geste aussi simple pour une personne valide que celui de préparer sa monture, dans cette association d’aide aux handicapés, constitue une véritable épreuve. Une organisation lourde. Pour chaque monture, trois adultes se trouvent mobilisés et accompagnent l’enfant dans sa tâche bénigne. Au final, nous apercevons un cavalier valide sur une double selle avec un gamin handicapé. L’éducateur hippique dirige les opérations sportives, tandis que dans le même temps le psychothérapeute prend soin de l’handicapé… Nous sommes stupéfaites par cette vision surréaliste. C’est au tour des enfants de nous montrer leurs exploits. Nous sommes sous le charme de ces enfants et nous leur montrons tout le plaisir que nous désirons partager avec eux. On note l’explosion naturelle de joie de ces petits bouts de choux lorsqu’ils réalisent pour nous les exercices proposés… Ils réclament nos applaudissements. Nous les leurs donnons sans retenue tant ils les méritent. Ce spectacle me touche au-delà des mots. La plupart d’entre nous sont mères, il s’avère impossible d’être insensible à ce qui se passe sous nos yeux… Ces moments sont à peine croyables, si nous Les Roses avons réussi notre aventure pendant ces cinq jours durant le Rallye, que dire de ces enfants qui doivent chaque jour affronter autant de difficultés qui leur paraissent insurmontables et nous prouvent que leurs combats demeurent bien plus honorables que le nôtre… Merde, je fonds de nouveau. Je craque. C’est la seconde fois que je pleure en deux jours… « Madeleine sort de ce corps ! »

La séance émotion achevée, les chevaux retournent à leur enclos. Cependant, nous n’en avons pas encore fini dans ce centre. Place aux danses folkloriques argentines, aux chants et à la fête. Là, Les Roses quittent leurs chaises de spectatrices pour rejoindre les enfants et nous dansons, chantons avec eux. Nous communions comme nous le pouvons avec ces bambins si attendrissants. Nous faisons une grande ronde avec eux, une grande chaîne solidaire entre les Peuples, un grand tunnel que chacun empruntera à tour de rôle dans la bonne humeur et sous des volées de confettis… La communion qui se propage durant ce moment me libère. Je me plais de ce que nous vivons et de ses visages d’enfants heureux que nous croisons… Le bonheur se lit tellement sur tous les visages, les photographes et cameramen s’en donnent à cœur joie afin de capter et immortaliser ces instants magiques. Mais, cela ne doit pas être compliqué : avant tout, c’est finalement leur métier et les enfants sont si démonstratifs. Pour ma part, je réalise que ce voyage initiatique constitue un vrai tournant de plus dans mon existence. Les émotions et les forces que j’engrange semblent me faire changer de dimension pour mon avenir. Je savais déjà depuis quelques années que je devais largement profiter de la VIE, m’éloigner de ce qui pouvait me tuer à petit feu, mais en vivant cette expérience avec Les Roses, je comprends encore mieux à quel point il demeure vital que j’aille vers la VIE avec encore plus d’élan… Plus de souffle de VIE. Plus de détermination.


Après tant d’émotions, retour au Sherathon. Après-midi d’errance dans Salta à s’imprégner de l’ambiance locale avant la grande soirée de remise des prix qui nous attend. Les préparatifs sont de rigueurs pour nous ! Une nouvelle douche, une petite robe de circonstance, un peu d’artifices pour maquiller nos visages fatigués et nous nous retrouvons à quelques mètres de l’hôtel dans un Club. Nous sommes toutes excitées. Nous attendons sur le trottoir avant l’ouverture de l’établissement. Nous voilà dans la dernière ligne droite de ce Rallye. Un agent de sécurité passe la tête par l’entrebâillement de la porte et nous observe. Quelques minutes plus tard, il reçoit un signal et les deux battants s’ouvrent afin de nous laisser entrer. Le moment s’avère impressionnant : nous pénétrons avec calme, mais avec une grande émotion dans ce lieu sous une haie d’applaudissements d’une trentaine de personnes, l’organisation, les personnalités locales -les mêmes qu’au départ-. Nous sommes toutes belles, magnifiquement maquillées et transportées encore une fois par la magie de l’instant. Nous ne touchons plus terre depuis quelques jours, mais là, nous avons la sensation d’être au-delà des nuages tant ce qui nous arrive nous éblouit. Ces applaudissements pour féliciter notre courage, et notre petite voix intérieure qui nous susurre « Et oui, nous l’avons fait ! » Il est temps de passer aux choses sérieuses… L’organisation nous offre un beau diplôme et une plaque en métal argenté avec nos noms certifiant l’année de notre participation à ce Rallye magique… Une fois la cérémonie achevée, quelques verres, avec ou sans alcool, sont engloutis par Les Roses. La séance de travail pour l’organisation n’étant pas tout à fait terminée, certaines Roses enchaînent quelques séances photo. Encore d’autres clichés souvenirs. Une fois ces obligations accomplies, nous voilà toutes prêtes pour que la fête commence ! Et que « The Show Must Go On », « Que la fête commence », « Que empiece la fiesta », … !!!

C’est le moment de la remise des prix. Les trois premiers équipages sont récompensés pour leurs performances. Mais pour une fois, ce n’est pas tout. Il y a un bonus : l’attribution d’« un prix spécial » décerné à une Rose, comme l’indique Jean-Jacques Rey, le Directeur et Créateur des Roses Des Andes. L’attente pour ce « Precio especial » dure un peu avant que Jean-Jacques Rey appelle la pilote, Fabienne, de l’équipage « Les sorcières du désert ». Tout le monde ignore ce qui va se passer. Pourtant, on sent bien que ce qui va suivre, on s’en souviendra longtemps. Les lumières baissent dans la salle. Sur l’écran géant apparaît un homme qui a un message à lui décerner. Devant près de 100 personnes, cet amoureux lui déclare son amour en lui faisant sa demande en mariage devant nous toutes… Surprise générale. D’autres applaudissements, encore plus nourris que d’habitude retentissent dans la salle. Ils sont accompagnés de cris bizarres des « youyou » d’Afrique du Nord. Fabienne s’effondre sous l’émotion qui dépasse toutes celles qu’elle vient de vivre pendant son Rallye avec sa coéquipière. Fabienne s’évanouit pour la bonne cause. Nous exultons toutes avec elle. C’est aussi cela la solidarité des Roses. Nous nous retrouvons tout aussi excitées qu’elle. Comme si cette demande en mariage nous arrivait à chacune de nous. Sans plus attendre, nous lui crions toutes d’une même voix : « Alors ? Alors ? C’est quoi la réponse : oui ou non ? » Fabienne crie un énorme « OUIIIIIIII » et s’effondre en pleurs… Jusqu’au bout de l’aventure, les émotions nous ont transportées du plus bas au plus haut. Des rires aux larmes. De la joie aux peurs. Bref, nous nous sentions vivantes de la première minute à la dernière durant cette expérience si extraordinaire.

La soirée se poursuit comme elle a débutée, dans la joie, le bonheur… Rien ne peut plus nous arrêter. Les Roses se lâchent au point de frôler la folie festive. Nous finissons par danser pieds nus… Plus rien ne nous inquiète… Enfin, presque. Nous comprenons que nous y sommes à ce moment tant redouté. Celui que nous désirions voir surgir le plus tard possible : « ça y est Trophée des Andes 2019, c’est fini ». Toutefois, si une certaine nostalgie commence à nous attraper, le plus important reste de se dire, « oui il est fini, mais j’y étais ». Je n’oublierais pas cette semaine de folie. Au final, grâce à cette expérience, j’ai rencontré des femmes exquises avec une belle grandeur d’âme que je ne veux pas oublier et que j’espère revoir dès que nous le pourrons. Après ce que nous avons partagé, je sais que je ne pourrai d’ailleurs pas les oublier. Jamais. Je demeure certaine que l’on se retrouvera lors d’un prochain challenge…

Il est temps de se séparer et de retrouver sa vie personnelle. Nous ne sommes absolument pas tristes, juste peut-être un peu mélancoliques. Si certaines Roses repartent déjà pour La France, j’ai fait le choix de poursuivre mon séjour argentin seule vers le nord afin de découvrir le site des chutes d’Iguazu et flâner davantage à Buenos Aires que nous n’avons pas eu le temps de visiter. Ces chutes sont mondialement connues, ce sont les plus grandes du monde. Quant à la capitale, je suis certaine qu’elle va prolonger mes émotions et encore m’offrir des instants aussi magiques et incroyables à travers la fin de mon périple en Amérique du Sud. Je sais que ce voyage ne restera pas dans ma boîte à souvenirs, mais qu’il va engendrer d’autres moments de partages. J’ai dans la tête plein d’images et de bonheur. J’en suis certaine. Je pense à tout ce que j’ai vécu, partagé, à tout ce que j’ai vu ici et j’avoue que je n’ai qu’un seul regret que je transmets à mon compagnon en espérant qu’il l’entende : « Mon chéri, j’aurais aimé, adoré que tes yeux voient ce que les miens ont perçu… Que ton cœur ressente les mêmes émotions… Revenons tous les deux pour les vivre ensemble !!! «  Le message ne pouvant être plus clair, il ne pourra certainement pas l’ignorer.
Live Report : Christine Sentenac, co-écrit avec Carlos Sancho (Coordinateur).
Images : Christine Sentenac et Libre de droits.