Fortunato Interview Exclusive par : Franck Leber, Images Esther W.Pink

Fortunato, trio français Heavy Metal qui a sorti 2 albums, Liberty en 2012 et Restless Fire en 2015, nous revient en ce printemps 2021 avec Insurgency, la chronique de ce dernier ayant paru ici, TV Rock Live a voulu en savoir plus sur cet émérite combo national. Emmené par Markus Fortunato, au chant et à la basse, David Amore à la batterie et Seb Vallée aux guitares, l’album est somptueux, addictif et impressionne beaucoup par sa richesse de composition.

TvRockLive.com : 6 ans après ton dernier album sous le nom de Fortunato, peux-tu nous dire Markus, comment t’es venu l’envie de relancer le groupe et comment cela s’est concrétisé ?
Markus : En fait le groupe ne s’est jamais vraiment arrêté. J’ai changé tous les musiciens en 2017 et quelques mois plus tard, on a repris les répétitions avec de nouveaux musiciens dont Seb et Sylvestre, les musiciens de Vae Viktis. Il y avait aussi Jean-Claude Alu (du Tribute Band Ossy Ozzy) qui était à la guitare avec nous les premiers temps. On a fait quelques concerts, puis Jean-Claude est parti et avec Seb, on a commencé à se présenter des morceaux mutuellement. Ceci afin de commencer le processus de composition du troisième album.

En effet, il me restait une bonne dizaine de morceaux non-utilisés pour l’album de KingCrown et Seb avait aussi des chansons destinées à Vae Vikits mais qui correspondaient tout à fait au nouveau concept un peu «militaire» de Fortunato. Cela aurait été trop bête de ne pas publier ces chansons qu’on trouvait vraiment bonnes.

On pourra aussi noter qu’on a fait un concert «phénoménal» en 2019 avec Manigance, Max Pie et KingCrown. Avec plein de potes musiciens qui chantaient et jouaient mes chansons. C’était inoubliable. Cette soirée nous a motivés comme jamais et a sérieusement contribué à relancer la machine.

TvRockLive.com : Quel est le processus de composition, le groupe ensemble ou seulement un seul compositeur toi je suppose ? Qui a produit l’album ?
Markus : Oui, oui, dans Fortunato, je tiens à ce qu’il y ait un seul compositeur par chanson. Seb a signé deux musiques et moi le reste. Quant aux textes, on s’y est tous un peu mis. David, Seb, Sylvestre (l’ancien batteur) et moi-même. On avait plein d’idées, on a essayé de les placer dans les chansons.

Sinon, au niveau du processus en lui-même, perso, je suis une éponge. J’écoute beaucoup de groupes différents, de la musique classique. Je m’inspire des mélodies, des rythmes, des ambiances. Tout ce qui me touche, en fait.

TvRockLive.com : Est-ce que la musique de Fortunato est le résultat de l’expérience et des goûts des musiciens ? Quelles sont les groupes qui t’ont inspiré ?
Markus : Bien sûr, on essaye de présenter notre musique à l’image de nos goûts, à l’image de notre intimité, de notre fort intérieur. Je crois que c’est impossible d’être crédibles dans le cas contraire. Lorsqu’il s’agit de créativité, pour faire quelque chose de «talentueux», il faut être sincère et laisser sa pudeur de côté. Le moins de «recettes» possibles, juste de l’inspiration (après viendra la transpiration !). Moi, je suis un hyper-sensible, je suis très souvent re-centré sur moi-même, je me remets en cause. Évidemment, souvent ça me dessert, dans ma vie de tous les jours notamment. Où il y a des personnes qui me prennent pour un égoïste et un mec intolérant. Mais, sans cette sensibilité, je n’arriverai pas à composer autant de musique.

C’est difficile à dire exactement qui et quand mais Il y a sans doute plein de groupes que j’écoute et qui m’ont inspiré. Riot et Yngwie Malmsteen sont mes favoris. J’adore aussi Wasp, Manowar, Accept, Whitesnake, Rainbow. Sans oublier quelques grands compositeurs, Schubert en tête.

TvRockLive.com : Quelle est ta formation musicale et quel (s) groupe (s) ou guitariste (s) t’a poussé dans la voie de la musique Rock ? As-tu la nostalgie de MZ en toi ?
Markus : Comme je te l’ai dit, la première fois que j’ai écouté le premier album du Maestro Yngwie, je me suis dit que c’était ultime. Le parfait mélange entre le Heavy et la musique classique-baroque. La basse y avait aussi une importance prépondérante. Au niveau de la basse, lorsque j’étais ado, c’est Steve Harris qui m’a donné envie de commencer directement avec cette instrument. J’adorais aussi le rôle qu’il a dans Maiden. Comme Leif Edling dans Candlemass.

Je n’ai pas la nostalgie de MZ car mon groupe Fortunato est l’exacte continuation de ce groupe. Et, en plus, maintenant je chante. C’est vraiment un plus pour moi tant j’adore chanter. La seule chose que je regrette, ce sont les répétitions hebdomadaires ou bihebdomadaires qu’on faisait avec MZ, et notamment avec Laurent, le batteur. Maintenant, je ne répète plus de manière régulière avec un seul de mes groupes. Ça, ça manque vraiment.

TvRockLive.com : Je me suis régalé avec les mélodies de l’album, elles me restent tellement en tête qu’il est difficile de s’en débarrasser, je pense au magnifique «Big Time» notamment. Quel est ton secret pour écrire de si bonnes mélodies ?
Markus : Merci beaucoup Franck. Tu sais, j’aime quand c’est Catchy !!! Comme je l’ai dit plus haut, je suis une éponge. Toutes les mélodies que j’entends, je m’en inspire. Je sifflote, je triture mes sifflements et j’en fais des mélodies. Pour m’inspirer, j’écoute évidemment de l’AOR («Big Time» c’est du Hard FM finalement) mais aussi de la variété des années 50 et 60 (Reggiani, Ferré…).

De plus, j’adore tellement le côté mélodique de notre musique préférée, que je ne peux m’empêcher de composer des parties de basse extrêmement mélodiques. D’ailleurs ça me joue des tours car quand il faut jouer de la basse et chanter en même temps, des fois, c’est bien bien compliqué !

TvRockLive.com : Parlons un peu des titres qui sortent du lot (à part «Insurgency» nous y reviendrons). Mes titres préférés sont «For Eternity», «A Star In The Sky», «My Mother Was A Who» ce qui ne veut pas dire que les autres titres soient moins bons. Que peux-tu nous expliquer la structure de ces titres, musicalement et lyriquement parlant ?
Markus : Ben, finalement, au niveau structures musicales, ces titres sont assez simples avec des couplets et des refrains assez faciles à repérer. J’aime bien ajouter un petit «pré-refrain» sur une autre tonalité pour faire la liaison. Pour «For Eternity», ce n’était, à mon sens, pas la peine. Et, spécifiquement sur cette chanson, le refrain est tellement Catchy qu’il n’y ait qu’une seule fois avant le Break.

Au niveau des paroles, ces trois chansons, sont des hommages à des gens qui nous sont chers et qui ne sont plus parmi nous. «For Eternity» est un peu plus alambiquée au niveau du sens. Ses paroles venant du paradis et s’adressant aux gens qu’il lui étaient chers dans sa vie ici bas. Sinon, «My Mother Was A Who» et «A Star In The Sky» sont des hommages très directs à mes parents. Avec humour ou non. Juste pour dire qu’ils me manquent.

TvRockLive.com : Je compare le titre «Insurgency» avec le titre «Liberty» et le titre «Asleep In Silence» des 2 précédents albums dans le Timing et la conviction qu’il dégage. Est-ce pour toi une volonté évidente de donner plus d’emphase à un titre en particulier sur tes albums pour mieux t’exprimer ou est-ce simplement l’expression de ton inspiration à un moment donné ?
Markus : Difficile à dire. Pour le titre «Liberty», clairement, oui, sur ce premier album du groupe, je voulais un morceau «chanté» beaucoup plus ambitieux. Il y a aussi l’instrumental «Poussière» qui est dans cet esprit sur le disque. J’ai essayé de développer les thèmes de ces chansons pour aller vers une sorte de lyrisme Heavy Metal.

Par contre, pour «Asleep In Silence» et «Insurgency», j’avais de gros textes et donc des idées très précises de ce que je voulais chanter. Racontant une histoire relativement développée. De ce fait, il fallait de la matière musicale pour pouvoir placer tout ces textes. Après, je voulais structurer ces morceaux de manières complexes et recherchées de manière à coller au texte. Je trouver par exemple que le rôle du violon et le Break de piano à trois voix sur «Asleep In Silence» s’accorde vraiment bien avec la profondeur du texte qui parle d’un immense Amour qui réchauffe le cœur, l’âme et qui peut ramener à la vie. En ce qui concerne «Insurgency», je pense que les gros chœurs de la conclusion sont suffisamment explicitent pour que l’on soit dans l’ambiance qu’il devait y avoir dans la capitale pendant la semaine sanglante.

TvRockLive.com : Est-ce que tu penses qu’Insurgency est plus évolué, plus mélodique que tes précédents albums plus axés à mon avis sur un Heavy Metal classique, même si je trouve qu’ils ont tout de même un sacré potentiel, car je trouve qu’il y a plus de sensations AOR et aussi progressives parfois sur ton dernier effort ?
Markus : C’est très compliqué à dire en fait. Je suis incapable de calculer quoi que ce soit lorsque j’écris une chanson. J’espère simplement que je progresse au niveau de la basse, du chant et aussi de la composition. En tout cas, j’aime mettre quelques-unes de mes influences AOR et progressive dans ma musique. Même si je trouve que le terme «progressif» ne correspond pas trop à la musique de Fortunato. Comment pourrait-on dire ? Ambitieux ? Ou même néo-classique pourquoi pas.

Si on veut comparer Insurgency avec les deux premiers albums, je voudrai juste que les auditeurs le trouvent meilleur. En termes de production mais surtout en terme artistique. Une Intervieweuse m’a dit qu’il y avait «un supplément d’âme» sur ce nouvel album. Je trouve que c’est vraiment bien dit.

TvRockLive.com : Comment s’est fait ta signature chez Rock City Music Label car c’est la 1ère sortie de ce nouveau Label ?
Markus : Elle s’est faite tout naturellement cette signature. Jeep, Laurent et David sont des amis. Jeep est le Manager de KingCrown et David en est le batteur. De mon groupe aussi maintenant. C’est la famille en fait. Tout simplement. On s’est mis d’accord pour cette signature pratiquement dès qu’ils ont su que je travaillais sur un nouvel album.

TvRockLive.com : Parle-nous du visuel qui a un rapport clair avec le titre de l’album, historiquement parlant ?
Markus : C’est Stan W. Decker qui a fait ce magnifique visuel. Je lui ai expliqué le concept du titre sur la commune de Paris du printemps 1871. Je voulais une représentation d’un épisode de la «semaine sanglante».

Ça faisait longtemps que je voulais écrire un titre «fleuve» sur ce fort courant humaniste du XIXè siècle. Ce fut la troisième révolution de ce siècle. En pleine période des Arts romantiques. Après celles de 1830 et 1848. Les idées de l’insurrection de la Commune ont aussi inspiré les derniers écrits politiques de Karl Marx. Hélas, c’est sans doute de cette révolution dont on parle le moins. Pourtant c’est celle qui, à mon avis, comportait le plus d’idées humanistes prônant réellement l’égalité entre les hommes. Quelle est la place réservée à cette insurrection dans nos livres d’histoire ?…

TvRockLive.com : Quels sont les projets sur lesquels tu travailles en ce moment et qu’envisages-tu d’autres pour 2021 (concerts, Live Internet, etc…) ?
Markus : Tout d’abord, sache que je suis contre les «Live Internet». Non seulement, ça risque de donner la mauvaise habitude de ne plus se déplacer aux concerts. Et puis, c’est encore et encore jouer le jeu de ces restrictions liées à la crise sanitaire. Même si je conçois que certains artistes n’ont plus que ça pour gagner leur vie. C’est un peu comme à l’arrivée du «Peer To Peer» et des Plateformes mp3. Les ventes de CD se sont écroulées et les artistes en ont gravement fait les frais. Sauf qu’il n’y a pas eu besoin d’une pandémie pour développer l’échange de fichiers quels qu’ils soient.

Sinon, j’ai plein de projets musicaux en ce moment. Je joue et compose pour des projets «ponctuels» qui m’amusent beaucoup dans lesquels je retrouve des amis. Tout ça est plus ou moins sérieux. Deux d’entre me tiennent à cœur, c’est Animal avec Thierry Collet au chant et, un album concept Underground Generation avec Steven Segarra à la guitare.

Mais, mon espérance principale est de faire un maximum de «vrais» concerts avec mes groupes principaux KingCrown et Fortunato au cours de cette année 2021 qui verra, je l’espère, le retour total de nos libertés. J’espère que la promo d’Insurgency va être efficace quant à la popularité montante du groupe. De plus, avec les KingCrown, on en train de composer le prochain qui verra sans aucun doute le jour à la fin de l’année.

Un grand merci à toi pour cette Interview. À bientôt.