MauditsPrécipice – Par : Franck Leber
Source Atone Records
Note : 5/5
Genre : Post-Metal Instrumental
Chronique n° 2


Ce n’est pas la 1ère fois que votre serviteur est devenu si intensément accro d’un album au point d’en écrire une nouvelle chronique, mais le cas ici présent est encore différent. Si Maudits a déjà eu tout un chapelet de louanges sur divers Webzines, et bien sûr sur www.tvrocklive.com pour leur dernier album Précipice, sorti le 17 mai 2024, l’objectif de ce nouvel écrit est de préciser les sensations exquises toujours présentes générées par Précipice car les écoutes successives ont développé une envie folle et vraiment tenace de les coucher sur le papier.


Le trio français a effectué peu après la sortie de l’album une mini-tournée de 6 dates qui a démarré à Reims, puis ce fut Rouen et qui s’est terminé à Paris après 3 concerts en Belgique. Défendre leur album était vital pour Olivier Dubuc (guitares, effets, ex-The Last Embrace), Erwan Lombard (basse, effets) et Christophe Hiegel (batterie, samples, ex-The Last Embrace). Alors il m’a semblé qu’à mon tour, je me devais de revenir sur cet album toujours incandescent, toujours si attractif et toujours si poignant. Avec l’apport de Raphael Verguin (violoncelle, Spectrale, Riciin, Psygnosis, Hypno3e), d’Emmanuel Rousseau (piano, mellotron, minimoog, claviers), de Frédéric Gervais (production) et de Nicolas Zivkovich (Rhodes, claviers sur «Seizure»), l’album possède toutes les qualités requises pour faire vibrer et transcender cette musique si particulière, si différente à chaque nouvelle écoute.


Et dès l’entame avec «Précipice Part I», l’auditeur est convié à un voyage incroyable fait de circonvolutions instrumentales étonnantes, témoin ces sons stridents introductifs qui sont un cri du plus profond de notre âme. Puis avec une stupéfiante cassure, la guitare prend le relais accompagnée par cette basse profonde et une batterie fine, qui éclaircissent ce paysage sonore absolument sublime. Les musiciens enveloppent peu à peu cette ambiance spécifique avec leur dextérité mélodique et les riffs hallucinogènes précipitent l’auditeur dans une sorte d’extase sans cesser renouvelée. Peu à peu avec la mélancolie jaillissante à mi-parcours et ô combien doucereuse du violoncelle de Raphael Verguin, le précipice va s’ouvrir aux oreilles chatouillées par cette merveilleuse mélopée finale, c’est en un mot extraordinaire de justesse et de magnificence. La batterie plus agressive va enfoncer le clou et appuyer sur le côté sombre si éminemment présent en fin de titre.

Sorti de cette espèce de magie musicale, c’est ensuite un autre aspect de la musicalité de Maudits qui prend le relais, avec «Seizure», ce n’est pas une coupure mais une continuité dans la force de composition du groupe. L’excellente batterie va rythmer encore et encore le début de ce titre très spatial, très alambiqué mais d’un éclat sauvage, quasi primaire, rythmé par des guitares puissantes et terriblement subtiles à la fois. Le jeu instrumental éloquent élaboré continue son œuvre de sensibilité, contrebalancé par une fièvre mélodique permanente, c’est vraiment d’une beauté pure, larmoyante et touchante. Ce titre développe un vrai délire aux guitares sur le final, c’est grandiloquent et les notes clouent l’auditeur sur place, avec une profonde sensibilité.

Avec «Pretium Doloris» court, sombre, tortueux et dense, Maudits exprime sa détresse avant que le jour ne se lève sur «Séquelles», sur lequel les repères Rock plus vifs et plus joyeux viennent sortir de la torpeur du titre précédent. C’est hyper emballant, jouissif et remuant, un vrai envol musical sur lequel la batterie continue de soutenir les guitares flamboyantes, alléchantes voire infernales !

L’arrêt brutal final arrive à point nommé pour lancer le titre «Précipice Part II», et c’est toujours ce violoncelle béni des dieux qui assouplit cette tristesse infinie, c’est sur ce titre que les larmes viennent, inexorablement, par petites touches, grâce à la guitare acoustique, aux claviers et une permanence mélodique jamais démentie. C’est le moment phare de Précipice, qui apporte un peu plus de gaieté, avec une finesse inégalée et une créativité instrumentale incontestable. Le bonheur intense d’écoute sera permanent par ces Breaks somptueux, ponctuant un ensemble fort, riche et tonifiant, l’auditeur se retrouve dans le précipice, c’est ensoleillé et porteur d’espoir, même si la seconde partie de la composition va replonger l’auditeur dans des mélopées emplies d’émotions, plaintives même, qui font ressortir nos larmes d’enfants. Sensations garanties sur ces expressions instrumentales travaillées et d’une telle maturité, rehaussées par le chant magistral des instruments.

Le classique «Lights End» passionnant de bout en bout, avec son violoncelle délicat et sa guitare acoustique merveilleuse vont sortir l’auditeur de son état d’inquiétude pour l’emmener peu à peu vers des contrées plus calmes, plus lumineuses, plus positives finalement. Et le dernier titre «Vielä Siellä» poursuit sur ce tempo avec élégance, empreint de délicatesse aussi mais avec toujours le recul nécessaire pour ne pas oublier les affres du désespoir ressenti précédemment. C’est une composition riche et forte, prémisse de l’avenir de Maudits, à mon sens. Le 8ème titre caché, dit «Ghost Track», laisse alors entrevoir les possibilités d’exploration musicale que le groupe dévoile peu à peu, par à coup et avec une énorme capacité novatrice.

Les sensations et les rêveries musicales que Précipice a apporté à votre serviteur, exprimées sur ce nouvel écrit, sont le reflet de la quête ininterrompue vers un bonheur musical intense. Maudits possède la capacité d’emmener l’auditeur dans un cheminement personnel, introspectif et sensoriel à la fois, à chaque nouvelle écoute et cela avec une facilité apparente très déconcertante. C’est extrêmement rare de pouvoir y parvenir mais c’est entièrement le cas avec Précipice : tout simplement colossal !!!


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