Fatoumata Diawara + Luiza
@ Paris, l’Olympia, le 22 mai 2024.
Live Report : Olivier Carle,
images : Siân Pottok


Ayant vécu en Afrique il y a une quarantaine d’années, j’ai eu la chance de découvrir et de m’imprégner de la musique de ce continent. Étant à Abidjan qui était la plaque tournante des artistes africains au début des années 80, j’ai eu l’opportunité de vivre en direct l’avènement des frères Touré (Kunda), de Salif Keita, de Mory Kanté, de Youssou N’Dour, d’Angélique Kidjo et de bien d’autres qui ont par la suite fait carrière en Europe. Je les ai d’ailleurs pour la plupart retrouvés quelques années plus tard lorsque je les ai fait venir pour des Showcases et des séances de dédicaces dans mon magasin de Fnac Créteil. C’était alors les années d’or de la World Music et tout particulièrement de celle venue d’Afrique. Tout ça fait que près d’un demi-siècle plus tard j’ai toujours autant d’appétence pour cette musique riche et variée et je ne rate jamais une occasion d’aller revoir les artistes précurseurs toujours dans le circuit comme Angélique ou Oumou Sangaré il y a peu et les « nouveaux » venus comme Fatoumata Diawara. J’avais découvert cette dernière il y a 7 ans aux Nuits de la Guitare de Patrimonio en Corse avec -M-, Oxmo Puccino, Toumani et Sidiki Diabaté pour le passionnant projet Lamomali… Particulièrement impressionné à l’époque par la voix et la présence scénique de la chanteuse malienne, je n’allais pas rater cette occasion de la retrouver en solo sur la scène de l’Olympia.

La première partie est assurée par une jeune chanteuse franco-brésilienne Luiza qui propose une Electro-Pop tropicale accompagnée d’un trompettiste et d’un saxophoniste ainsi que de sons préenregistrés. C’est frais et dansant, assez éloigné du style de Fatoumata mais on se laisse vite prendre par ces Grooves chaloupés et la bonne humeur communicative de cette nouvelle artiste qui sort un Single le mois prochain… A suivre donc !


Vers 21h10 c’est au tour de la vedette de la soirée de monter sur scène devant une salle comble et impatiente de la retrouver. Elle est accompagnée d’un guitariste, d’un clavier, d’un bassiste et d’un batteur, tous de très haut niveau. Pendant près de 2 heures et demie, Fatoumata va nous proposer un Set qui puise largement dans son excellent dernier album « London Ko » sorti l’année dernière et qui contient des collaborations prestigieuses avec entre autres Damon Albarn (Blur, Gorillaz…), son complice -M-, le Jazzman cubain Roberto Fonseca ou la jeune Star de l’Afropop nigériane Yemi Alade… La scène est surmontée d’un grand écran qui diffusera tout au long de la soirée de très belles images de la Star de la soirée sous la forme de clips souvent d’une très grande richesse créative et de modernité.


La tradition malienne sera néanmoins très présente notamment via les coiffes, le masque et la tenue vestimentaire de Miss Diawara. Ce savant mélange de tradition et de modernité est probablement ce qui caractérise le mieux cette artiste à la fois forte et d’une grande sensibilité. Son discours est d’ailleurs toujours pertinent et courageux. A l’instar d’Oumou Sangaré ou d’Angélique Kidjo, elle tient des propos très féministes et s’en prend au schéma patriarcal en dénonçant notamment les écarts de salaire entre hommes et femmes et le manque de représentantes du sexe féminin dans la politique. Ayant été elle-même victime de l’excision, elle dénonce courageusement les mutilations sexuelles dont sont victimes beaucoup d’Africaines encore aujourd’hui pour d’obscures raisons pseudo-culturelles. Elle tient aussi un discours de paix et d’universalisme très applaudi par le public présent sans tomber dans les poncifs et la caricature.


Elle pleure beaucoup en faisant monter sur scène sa maman d’adoption à qui elle dédiera d’ailleurs un très beau morceau.


Non contente de chanter magnifiquement bien, elle se débrouille pas mal du tout à la guitare électrique et se fendra même d’un solo inattendu. Fatoumata rendra un hommage vibrant à Angélique Kidjo, son aînée, qui l’a visiblement beaucoup influencée et prise sous son aile à ses débuts avant de chanter ensemble et d’esquisser quelques pas de danse…


Mathieu Chédid viendra avec sa guitare pour 2 morceaux, l’un issu de Lamomali « Une Ame » et l’autre du dernier album de Miss Diawara « Massa Den ». Il sera aussi de retour pour le rappel avec sa six-cordes illuminée aux couleurs de -M-. Tout l’Olympia sautera à l’unisson et fera les chœurs à de nombreuses occasions au cours de cette soirée mémorable.


Très heureux d’avoir participé à cet événement musical de haute tenue qui nous rappelle que l’Afrique possède encore aujourd’hui une pléiade d’excellents musiciens qui ont pris la relève des aînés. Le Highlife, l’Afrobeat, la Rumba, le Mandingue, l’Afropop, le Makossa, etc. ont encore de beaux jours devant eux et c’est une très bonne nouvelle !

Merci à Franck et Wagram Music